mercredi 9 mai 2007

La démission forcée de Boiclair

André Boisclair a pris la meilleure décision dans les circonstances : démissionner de son poste de chef du Parti québécois. À la lumière des événements des derniers jours, il était clair qu’il était assis sur un siège éjectable et que ce n’était qu’une question de temps avant qu’on ne lui montre la porte de sortie. L’atmosphère était devenue insupportable pour lui; la pression à l’intérieur de l’autoclave était entretenue par des «purs et durs» qui continuaient à augmenter le feu de la cuisinière plutôt que de le réduire.

Encore une fois, le Parti québécois nous offre un de ces psychodrames dont lui seul a le secret. Les militants «purs et durs» préfèrent le déni, la fuite en avant, en se débarrassant du chef plutôt que de s’interroger sur les raisons profondes de leurs insuccès électoraux du 26 mars dernier.

Il semble clair, pourtant, que la souveraineté, telle que proposée actuellement par le PQ, n’est plus un objectif partagé par la majorité de la population québécoise. Ces militants préfèrent entretenir l’illusion d’être à la portée de la réalisation de leur rêve en se basant sur les résultats du référendum d’octobre 1995, convaincus qu’ils sont de n’être qu’à quelques milliers de voix de la Terre promise. C’est oublier que ces résultats sont largement dus à l’implication de Lucien Bouchard. N’eut été de la participation de ce personnage charismatique dans la campagne référendaire de 1995, il est plus que probable que le pourcentage de «Ouis» recueillis aurait été de beaucoup inférieur.

Il est souhaitable qu’il y ait une course au leadership dans les prochaines semaines plutôt qu’un couronnement. Pour employer un cliché, le Parti québécois se retrouve à la croisée des chemins. Il ne pourra certainement pas faire l’économie d’un débat d’idées. Les militants devront avoir le courage de remettre en question tout le programme, y compris l’article 1, sinon leur formation politique risque d’être reléguée pour bien longtemps au statut de tiers parti ou de carrément disparaître. Il est plus que temps qu’ils se rendent compte que nous ne sommes plus dans les années 1960 et que le Québec a fait des progrès considérables à l’intérieur même de la fédération canadienne; qu’ils modernisent leur discours et qu’ils reviennent sur Terre pour être en mesure de saisir les aspirations et les préoccupations réelles de l’électorat. En outre, sans nécessairement adopter un programme de droite, le PQ dispose tout de même de l’espace politique pour adapter sa social-démocratie au contexte actuel, de la moderniser pour la débarrasser de son image obsolète des années 1970 si chère aux vieux bonzes du parti.

C’est justement cette capacité de bien mesurer l’humeur de la population québécoise qui a tant fait défaut au Parti québécois lors de la dernière campagne électorale, ce qu’a si bien su faire Mario Dumont. Ce dernier a compris que les Québécois sont passés à autre chose et que la majorité des électeurs veulent s’extirper du sempiternel débat entre fédéralistes et souverainistes. Il est temps que le PQ réalise que la souveraineté n’est plus nécessairement la solution aux problèmes de la société québécoise du 21ième siècle.

mardi 17 avril 2007


LA TENTATION OBSCURANTISTE D'UNE CERTAINE GAUCHE EUROPÉENNE



Je viens de terminer la lecture d’un livre intéressant que j’ai eu l’occasion de me procurer récemment. Il s’agit de l’essai intitulé «La tentation obscurantiste » publié en 2005 par Caroline Fourest aux Éditions Grasset. Ce livre s’est mérité « Le prix du livre politique 2006 », décerné par l’Assemblée nationale française.

Journaliste au désormais célèbre magazine «Charlie Hebdo » (lequel a fait l’objet d’une poursuite pour avoir publié, au nom de la liberté d’expression, les célèbres caricatures du prophète Mohammed diffusé originalement par un journal danois) et présidente de ProChoix, Caroline Fourest est une jeune femme courageuse qui n’a certainement pas peur de clamer son opinion haut et fort. Elle est particulièrement reconnue pour son militantisme de gauche et par son opposition acharnée aux intégrismes de tout genres, mais plus particulièrement aux intégrismes religieux, notamment catholique, évangélique américain et islamique.

Comme elle l’a déjà souligné, Caroline Fourest tient à conserver son esprit critique et à garder sa conscience intacte. Elle refuse, à bon droit, de sacrifier sa liberté d’expression au nom d’un certain « relativisme culturel » ou sous le couvert d’une responsabilité quelconque de ne pas heurter les susceptibilités de certaines gens.

Pour l’essentiel, son livre dénonce les dérives d’une certaine gauche européenne vers une alliance de facto avec les éléments les plus radicaux de l’islam. Cette gauche, dite altermondialiste, s’allierait avec ces éléments au nom d’une opposition au capitalisme et, évidemment, aux États-Unis. De ce fait, selon Fourest, cette gauche constitue le jouet ou les pions de nouvelles forces totalitaires représentées par les intégristes musulmans. De cette alliance objective, naissent des prises de position qui vont pourtant à l’encontre de celles adoptées traditionnellement par la gauche. C’est ainsi, par exemple, que certains mouvements féministes, pourtant intransigeants (avec raison) sur le principe de l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, n’hésitent pas à défendre le port du voile par les musulmanes, même au sein des institutions laïques et ce, au nom du soi-disant respect de leur liberté de choisir, voire même de leur « libération » de l’oppression occidentale. Pour l’auteure, ces mouvements féministes le font aussi avec la prétention de soutenir un « féminisme islamique ». Caroline Fourest n’hésite pas à dénoncer ce genre de soutien, d’autant moins que les mêmes mouvements ne se sont jamais gardés de lutter, cela va de soi, contre d’autres formes d’intégrismes religieux, notamment la droite ultraconservatrice chrétienne.

Elle ne s’oppose pas à l’islam comme tel, mais plutôt à la façon dont cette religion est utilisée par les fondamentalistes ou intégristes pour préconiser des valeurs qui, non seulement s’opposent aux valeurs occidentales, mais heurtent aussi, au premier chef, les musulmans laïques ou religieux modérés venus s’installer en France, entre autres choses, pour vivre dans une société ouverte où ils n’auraient pas à subir les diktats des intégristes religieux. Elle dénonce donc les amalgames douteux qui consistent à traiter « d’islamophobes » ou de « racistes » tous ceux et celles qui osent se prononcer contre l’instrumentalisation intégriste de l’islam. Ce genre d’accusation n’est pas seulement formulée par des intégristes musulmans, mais aussi par cette fraction obscurantiste de la gauche atteinte d'un complexe post-colonial. «En confondant en un seul terme ce qui relève de la critique laïque et légitime de l’islam – notamment la critique de ses dérives sexistes, homophobes ou intégristes – et ce qui relève de l’attaque raciste envers les musulmans, ce mot a fortement brouillé les repères d’une gauche déjà déboussolée par son complexe post-colonial» (p.65-66). Dans sa définition actuelle, le mot «islamophobie » « confond la haine envers des musulmans pour ce qu’ils sont (ce qui doit être dénoncé comme raciste) avec l’hostilité envers une croyance, une religion, une idéologie (ce qui relève de la liberté d’expression)» (p.68). Et, bien sûr, bon nombre d’individus ont intérêt à maintenir cette confusion des genres. Pour l’auteure, les dénonciateurs des dérives des intégristes musulmans se voient souvent aussi accusés de faire le jeu d’Israël ou de George W. Bush. Lorsqu’ils sont musulmans, les pourfendeurs de l’intégrisme sont accusés d’être des « traîtres ». (Ça ne vous rappelle pas quelque chose?)

Je n’ai pas les connaissances requises pour juger cet essai à son mérite. Par contre, il traite de plusieurs points très actuels, même dans le contexte québécois à l’heure des accommodements dits « raisonnables ». Certaines personnes n’ont pas manqué de critiquer assez sévèrement le livre de Caroline Fourest. Par exemple, une d’entre elles prétend que Fourest aurait déformé ses propos. Par ailleurs, il a aussi ses défenseurs. Quoi qu’il en soit, ce livre vaut la peine d’être lu et apporte de l’eau au moulin de tous ceux qui pensent qu’il vaut la peine de lutter contre toute forme d’intégrisme.

samedi 7 avril 2007

UNE ÉLECTION INOUBLIABLE

Même si on a souvent tendance à qualifier "d'historique" un événement qui se révèle, en fin de compte, sans grande importance, on peut certes sans se tromper dire que l'élection québécoise du 26 mars dernier mérite amplement ce qualificatif. Ce genre de scrutin qui débouche sur des résultats qui bouleversent complètement un échiquier politique ne se voit que trois ou quatre fois dans un siècle, tout au plus. En élisant un nombre étonnamment élevé de candidats adéquistes, les Québécois ont parlé et ont parlé fort. Ils renvoient ainsi dos à dos les deux "vieux partis" politiques traditionnels que sont le Parti Libéral et le Parti Québécois. Les électeurs ont clairement démontré leur volonté de sortir du bourbier infernal qu'est devenue la politique québécoise au cours des trente dernières années.

En choisissant d'envoyer un fort contingent d'adéquistes à l'Assemblée nationale, l'électorat québécois a clairement démontré sa volonté de s'affranchir de la sempiternelle confrontation entre ces deux formations politiques au sujet de la question nationale, confrontation qui mobilise depuis trop longtemps les forces vives du Québec au détriment d'enjeux aujourd'hui beaucoup plus importants. Comme bon nombre de commentateurs expérimentés l'ont déjà souligné dans leurs éditoriaux ou leurs chroniques, les libéraux et les péquistes n'ont pas été capables de lire correctement l'humeur de l'électorat et n'ont pas su détecter que ces derniers désiraient passer à autre chose.

Pour leur part, les libéraux, insensibles au taux élevé d'insatisfaction de la population, ont choisi la mauvaise stratégie de campagne en misant essentiellement sur leur bilan. Les péquistes et leur chef André Boisclair, coïncés par leur feuille de route, ont dû s'engagner à tenir une "consultation populaire" sur l'indépendance le plus tôt possible durant leur mandat. Ils allaient ainsi délibérément à l'encontre d'une large majorité de l'électorat qui ne voulait pas la tenue d'un troisième référendum sur la souveraineté du Québec. Curieusement, le pourcentage du total des voix recueillies par les libéraux et les adéquistes correspond à peu de près à la proportion des répondants qui, lors de sondages, disaient ne pas vouloir d'un autre référendum.

Je n'ai pas voté pour l'une ou l'autre des trois principales formations politiques. J'ai accordé mon appui au Parti Vert, notamment parce que je connaissais le candidat et parce que je croyais qu'il nous aurait fait un bon député. Par contre, je ne suis pas mécontent du résultat. Les adéquistes auront l'occasion de faire leurs classes comme opposition officielle. S'ils jouent bien leurs cartes et s'ils assument leur rôle d'opposition officielle de manière responsable, nul doute qu'ils accroîtront leurs chances de gagner les prochaines élections. En outre, il y a fort à parier que, flairant l'odeur du pouvoir, les candidatures de prestige se bousculeront aux portes pour tenter leur chance de remporter l'investiture dans bon nombre de circonscriptions. Par ailleurs, les adéquistes auront intérêt à se doter d'un programme bien articulé, réaliste et comportant des mesures qui ne semblent pas improvisées (ex : l'abolition des commissions scolaires).

L'élection que nous venons de vivre s'apparente tout à fait à ce que les politologues appelent une "élection de réalignement". Une élection de réalignement se produit quand un parti, porté par une nouvelle génération, parvient à supplanter une formation politique promue par une précédente génération. En fait, à mon avis, l'élection du 26 mars s'intègre dans une phase de réalignement qui comprendra probablement 2 ou 3 scrutins. À titre d'exemple, la dernière phase de réalignement partisan au Québec s'est produite au cours de la période 1970-1976 qui a vu le Parti Québécois remplacer graduellement l'Union Nationale. En fin de compte, l'ADQ pourrait très bien être ce nouveau parti générationnel qui remplacera l'une des deux autres formations politiques dans un nouveau système bipartisan. Cette montée d'un nouveau parti au tournant des années 2000 avait été prévue en 1986 par l'éminent politologue Vincent Lemieux.

À mon humble avis, il s'avère plus que probable que le Parti Québécois soit la formation politique qui sera remplacée par l'ADQ, à moins que les péquistes ne modifient radicalement leur programme. En effet, les résultats de l'élection doivent amener le Parti Québécois à réfléchir sérieusement, non seulement à son programme, mais aussi à son option fondamentale. Tout devrait être sur la table. Évidemment, l'idée de faire du Québec un pays ne disparaîtra probablement jamais. C'est un souhait légitime et ses partisans ont parfaitement le droit d'en faire la promotion. Généralement, l'immense majorité des indépendantistes le font d'une manière responsable et respectueuse des partisans du fédéralisme. Cela étant dit, il leur faudra se demander si cet objectif est toujours pertinent dans le contexte actuel. Je suis convaincu que la grande majorité des Québécois répondrait non à une question très claire portant sur l'indépendance pure et simple du Québec (sans concept d'association ou de partenariat quelconque).

Il suffit de se promener sur les forums indépendantistes pour découvrir qu'une bonne part des militants péquistes souhaite une radicalisation de la démarche menant à la souveraineté. Cette radicalisation se traduit notamment par le désir de tenir une élection référendaire. On a pu le constater aussi dans la récente proposition de M. Louis Bernard d'axer entièrement le programme du Parti Québécois sur la souveraineté. Si le Parti Québécois se dirige vers cette voie, celui-ci s'engagera vers la marginalisation.

mardi 6 mars 2007

DES RÉFÉRENDUMS À RÉPÉTITION

Dans une récente déclaration, le chef du Parti Québécois, André Boiclair, a clairement laissé entendre qu’un échec à un troisième référendum sur la souveraineté ne fermerait pas la porte à la tenue d’autres référendums sur la même question.

Cela signifie donc qu’en cas d’échec, peu importe le pourcentage de voix exprimées en faveur du non, le PQ ne tiendrait aucunement compte de la volonté de la population. Quand bien même les résultats seraient similaires à ceux de 1980, le Parti Québécois considérera toujours que les électeurs ne se seront pas prononcés définitivement sur l’idée de faire du Québec un État souverain. Les péquistes trouveront bien toutes sortes de raisons pour «invalider» ce vote; oseront-ils prétendre que le référendum aura été volé ? Belle attitude démocratique en vérité !

On se trouve ici devant «deux poids, deux mesures» puisqu’un oui majoritaire, même à 50 % des voix plus une, sera vu par les indépendantistes, surtout par les «purs et durs», comme un vote définitif. Plus question par la suite de revenir en arrière (c’est la fameuse cage à homards de M. Parizeau). Il n’est pas inimaginable de penser que la constitution d’un Québec indépendant pourrait formellement interdire la réintégration du Québec dans l’espace politique canadien et, par conséquent, les formations politiques fédéralistes.

Malgré que les sondages indiquent clairement que la majorité des Québécois ne veut pas d’un troisième référendum, les péquistes vont quand même en tenir un advenant leur victoire à l’élection du 26 mars. Pauvre Québec !

lundi 26 février 2007



UNE DES HONTES DE NOTRE PASSÉ


Il est de ces événements dans l’histoire d’un peuple qu’on aurait préféré qu’ils ne fussent jamais survenus, mais qui, malheureusement, sont souvent occultés dans nos maisons d'enseignement. L'un d'entre eux implique directement une grande partie de nos élites nationalistes de la fin des années 1940. Cet événement, le journaliste indépendant, Yves Lavertu, en a fait un livre. Il s’agit de : «L’affaire Bernonville», qu’il a publié en 1994.

La lecture de cet excellent ouvrage est passionnante. Lavertu parvient à décrire, en moins de deux cents pages, comment un criminel de guerre français, Jacques Dugé de Bernonville, collaborateur de l’Allemagne nazie sous le régime du Maréchal Pétain, a bénéficié du soutien actif et intensif des éléments les plus réactionnaires du nationalisme québécois, lorsque ce triste sire s’est «réfugié» au Québec après la seconde guerre mondiale.

Qui est Bernonville? Yves Lavertu nous apprend que Bernonville est né en 1897, à Auteuil, près de Paris, dans une famille aisée ayant des origines aristocratiques. Celui-ci a combattu l’Allemagne lors du premier conflit mondial. Ses actes de bravoure lui valurent bon nombre de décorations. Selon Yves Lavertu, Bernonville aurait par la suite fait une brillante carrière militaire qui lui a mérité d’être décoré de la Légion d’honneur.

En 1926, on retrouve Bernonville au sein de l’Action française de Charles Maurras. Il rencontre bon nombre d’éléments réactionnaires qui souhaitent le retour à la monarchie et l’instauration, en France, d’un régime autoritaire. Au début des années 1930, «Bernonville pousse encore plus loin son engagement dans les mouvements d’extrême droite. Il piaffe d’en découdre avec les communistes. En janvier 1938, on le trouve impliqué dans le complot visant à renverser la République par la force» (p. 22).

Personnage en vue sous le régime de Vichy, grand supporteur du Maréchal Pétain, Bernonville prêta serment à Hitler à l’automne 1943 et figure alors sur le registre de paie des Allemands. Il déploie un zèle à pourchasser les résistants français. Par exemple, le dimanche, 26 mars 1944, en compagnie de trois bataillons allemands et de 400 hommes de la police allemande et de SS, Bernonville donne la chasse aux résistants qui s’étaient réfugiés sur le plateau des Glières. Quelque 180 hommes sont capturés et certains, soupçonnés d’être communistes, sont torturés et tués. Par la suite, Bernonville poursuit sa tâche dans le Vercors (p. 28) et commet d’autres exactions en Saône-et-Loire. Il dirige fréquemment les interrogatoires de résistants français au cours desquels on pratique la torture.

Selon Yves Lavertu, le débarquement allié en Normandie le 6 juin 1944 annonce la fin imminente de l’occupation allemande. Vers la troisième semaine d’août 1944, Bernonville quitte la France pour l’Allemagne en compagnie de hauts dignitaires nazis. De retour en France à l’automne 1944 afin d’accomplir une mission qu’il ne fut, en fin de compte, pas capable de mener à bien, Bernonville a bénéficié du soutien du clergé catholique au moment de la Libération de la France en le cachant. En novembre 1946, il se retrouve à New-York, déguisé en prêtre, sous le nom de Jacques Benoît. À la fin novembre, il quitte cette ville pour se «réfugier» au Québec. Le 8 octobre 1947, Bernonville est condamné à mort par contumace par un tribunal de Toulouse.

Toute la suite du livre de Lavertu révèle les dessous de la sordide affaire Bernonville. On y apprend comment les principaux acteurs du nationalisme canadien-français, admirateurs presque inconditionnels du Maréchal Pétain, ont manœuvré et remué ciel et terre pour assurer sa défense, ainsi que celle d’autres sinistres personnages de même nature (dont Georges-Benoît Montel) qui avaient également réussi à se « réfugier » au Québec. Ce travail était mené sous les auspices d’un « Comité de défense des réfugiés français », mis sur pied par l’historien Robert Rumilly, citoyen français ayant émigré au Canada en 1928. Outre Rumilly, parmi les principaux défenseurs de Bernonville et de ses affreux compères, on retrouve René Chaloult, Lionel Groulx, Camilien Houde, et d’autres individus qui sont devenus des personnalités très connues du mouvement souverainiste. Toute opposition à la présence de Bernonville et de ses acolytes au Québec était décriée par leurs supporteurs comme étant un complot mené par les communistes, les francs-maçons ou encore par la «juiverie internationale» contre des gens «fort honorables» qui avaient le droit, somme toute, de trouver refuge ici. On traçait même un parallèle avec des patriotes de 1837-1838 qui avaient obtenu le droit d’asile aux États-Unis. Comme le souligne mon collègue et ami blogueur, Daniel Laprès dans son billet du 26 janvier 2007, Montel est mort paisiblement chez-nous tandis que Bernonville, lui, dut s’enfuir au Brésil en 1951 où il y est mort assassiné en 1972.

Je terminerais ce billet en soulevant l'aspect plutôt sarcastique du fait que tous les fédéralistes francophones du Québec, sans exception, sont considérés comme des «vendus», des «collabos» ou encore des «traîtres à la nation» par les éléments les plus extrémistes et radicaux du mouvement indépendantiste québécois. Cela en dit long sur ce qui attend peut-être les fédéralistes si jamais les indépendantistes les plus radicaux devaient prendre le pouvoir dans un Québec devenu souverain.

dimanche 4 février 2007

DE LA NÉCESSITÉ DE CONSERVER LE SENS DES MOTS

Après quelques mois de silence, je reprends la plume (ou plutôt le clavier) en espérant cette fois pouvoir alimenter ce carnet plus régulièrement à l'avenir. Au cours de ces derniers mois, j'ai néanmoins continué de m'intéresser à l'actualité économique et politique.

Il est clair que la question nationale s'avérera l'enjeu crucial des prochaines élections provinciales au Québec. Sans nul doute, les discussions seront vives et animées entre les indépendantistes et les fédéralistes. Je souhaite que celles-ci soient empreintes de civisme de part et d'autre; que les individus sauront élever leur niveau de discussion en s'en tenant aux débats d'idées.

Bien qu'étant fédéraliste, je conçois parfaitement que des gens puissent avoir une vision différente de la mienne et souhaiter que le Québec devienne une nation indépendante. Cependant, à lire les propos de certains individus sur des forums indépendantistes, on s'aperçoit que le sens des mots ou le sens de la mesure ne veulent absolument rien dire pour eux.

Lorsqu'ils parlent de l'indépendance du Québec, ils évoquent les termes de liberté, de libération nationale, comme si le Québec était soumis à une dictature implacable. D'autres emploient la notion de goulag, rien de moins pour décrire le Canada ! Pourtant, les seuls faits que les indépendantistes puissent promouvoir leur idéal dans le cadre actuel du système politique canadien sans crainte d'être accusés de trahison (comme ne manquent pourtant pas de le faire une petite minorité d'indépendantistes extrémistes envers les fédéralistes francophones du Québec); qu'ils puissent faire élire des députés partisans de cette option politique au sein même du parlement fédéral, démontrent de façon éloquente qu'ils ont perdu le sens de la mesure en employant ces épithètes pour décrire le pays. Au contraire, le Canada, loin d'être une dictature ou un goulag, constitue plutôt une démocratie exemplaire à ce titre. Je ne prétends pas que le Canada soit parfait; loin s'en faut! Mais, je ne connais pas beaucoup de démocraties fédérales qui accepteraient que des députés séparatistes siègent au sein même du parlement fédéral.

À mon humble avis, la liberté d'un peuple repose tout d'abord sur celle des individus qui la composent. En ce sens, le respect des libertés individuelles préfigure celui des libertés collectives. Ici même, les exemples de lois québécoises qui restreignent nos libertés individuelles (ou qui limitent notre liberté de choisir au profit des libertés collectives) ne manquent pas. J'y reviendrai fort probablement dans un billet ultérieur.

Dans le contexte de la prochaine élection, le respect du sens et de la mesure des mots représente une condition sine qua non à la poursuite de tout débat d'idées. Sinon, toute argumentation avancée à l'appui de notre thèse risque de perdre sa crédibilité.

mercredi 13 septembre 2006

QUAND IL EST NÉCESSAIRE DE DÉNONCER
DES PROPOS OUTRANCIERS DE FÉDÉRALISTES
FANATIQUES OU EXTRÉMISTES


Les personnes qui ont lu mes messages jusqu'ici savent parfaitement que je suis un fédéraliste modéré et que je m'oppose totalement aux propos véhiculés par les extrémistes, qu'ils soient indépendantistes ou fédéralistes. Mais jamais, au grand jamais, j'aurais pensé qu'un jour je me verrais dans l'obligation morale de dénoncer des propos contre Pierre Falardeau et le journal Le Québécois, d'autant moins que je ne figure pas au nombre de leurs admirateurs !

En effet, un fédéraliste, que je qualifie d'extrémiste, a fait parvenir aux responsables du journal Le Québécois une lettre qui contient des propos pour le moins orduriers au sujet de Pierre Falardeau et du journal. Cette lettre haineuse et délirante peut être lue sur le site Web du journal en allant consulter leur forum de discussion dans la rubrique intitulée :"Une nouvelle race de lucides qui ne nous apprécient pas". Ce message m'a littéralement fait dresser les cheveux sur la tête ! En comparaison, les propos parfois durs qu'un fédéraliste modéré, mon collègue-blogueur Daniel Laprès, a déjà écrit au sujet de ce journal sont presque doux ma foi !

Dieu sait si je ne suis aucunement d'accord avec la vision politique de M. Falardeau et avec sa façon tout à fait particulière d'en parler. Il est très connu que Pierre Falardeau ne se gêne pas du tout pour affubler d'épithètes grotesques les fédéralistes, même modérés, et souvent les personnes qui ne pensent pas comme lui. Il est évident que je n'ai pas non plus la même opinion politique que celle des responsables du journal "Le Québécois". Dieu sait aussi que je m'oppose résolument à une certaine forme de discours ou de prose que ce journal publie parfois, discours qui ne me semble pas respecter beaucoup ceux et celles dont les opinions s'écartent d'un certain courant "pur et dur" du nationalisme québécois.

Mais, n'empêche ! Je trouve que ce type de courriel envoyé au journal Le Québécois par un fédéraliste extrémiste dépasse absolument toutes les limites de l'acceptable. Pour paraphraser Voltaire, je me battrai toujours pour que ceux qui ne partagent pas mes idées puissent conserver le droit d'exprimer et de promouvoir les leurs. Je ne suis pas d'accord avec la façon de Pierre Falardeau d'exprimer ses idées, soit ! Bon, c'est son style d'employer un language très cru pour dire ce qu'il pense et il a le droit de le faire. Après tout, ne sommes-nous pas en démocratie ? Par contre, il est vrai aussi que j'ai le droit de dire que ce style n'est pas ma tasse de thé. Et je ne suis pas nécessairement pour autant quelqu'un de "politically correct".

Je pense qu'on peut s'opposer au style de Pierre Falardeau et à ses idées, mais sans recourir à la haine. Je m'objecterai donc toujours qu'une personne montre son désaccord avec les idées du cinéaste ou celles de toute autre personne en tenant des propos haineux tels que ceux que l'on retrouve dans ledit courriel. Par ailleurs, objectivement parlant, ce courriel fait même du tort à la cause fédéraliste et tend à discréditer tous les fédéralistes sans aucune exception, même les plus modérés, dont je suis.

Je dénonce donc vivement ces propos vulgaires et haineux. Je m'insurge contre ce genre de diatribe qui n'a absolument pas raison d'être dans des débats politiques ou dans n'importe quel autre type de débat. Ce n'est certes pas en tenant des propos aussi excessifs qu'on fait avancer une discussion. Cela m'afflige de voir que quelqu'un puisse se permettre d'écrire de tels commentaires.

En fait, je ne comprends pas du tout qu'une personne puisse se laisser aller à une telle logorrhée haineuse. Il faut dire que je n'ai jamais haï quelqu'un de toute ma vie. Je ne suis habituellement pas rancunier non plus, la preuve en est que pas plus tard que dimanche, le 10 septembre 2006, le modérateur du forum "Le Québécois" m'a banni de ce lieu de discussion (droit que je lui reconnaît bien sûr) pour une raison qui ne m'a jamais été expliquée. À moins que je ne fasse erreur, la perception que j'en ai est que j'ai été expulsé, entre autres raisons, parce que mes commentaires contre les propos que le pape a formulés devant les évêques ontariens le 9 septembre 2006, n'ont pas eu l'heur de plaire à un membre indépendantiste de ce forum qui aurait, apparemment, une conception pour le moins ultra-traditionnaliste, ultra-conservatrice ou rétrograde du catholicisme (j'ai d'ailleurs eu droit à quelques épithètes de sa part qui m'ont fait sourire, soit deux directement : hérétique, schismatique, et une autre par association : "taré satanisé" - rien de moins). Et pourtant, je m'exprimais comme catholique pratiquant, mais qui est tout de même capable de faire la part des choses dans ce que le pape dit (comme la plupart des catholiques du Québec d'ailleurs, qu'ils soient pratiquants ou non). Oh ! Je suis très très loin d'être un saint, croyez-moi ! J'ai bien déjà assez de défauts à corriger; ce but m'occupera amplement pour le reste de mes jours.

Donc, cette lettre délirante transmise au Journal Le Québécois par un(e) fédéraliste extrémiste se trouve tout à fait aux antipodes de la vision modérée que d'autres fédéralistes et moi défendons et promouvons dans nos blogues respectifs, même si, parfois, il peut arriver que nous ne mâchions pas du tout nos mots lorsqu'il s'agit de dénoncer des propos qui nous apparaissent excessifs, voire même extrémistes, qu'ils fussent énoncés par des indépendantistes ou des fédéralistes.

S'il devait y avoir prochainement un référendum sur l'indépendance du Québec, les débats vigoureux qui ne manqueront certes pas de survenir devront éviter le même genre de diatribe que celle de la lettre dont il est question ici. Ils devront être empreints de civisme et de respect envers les partisans de l'option opposée.

Le Québec a des revendications très légitimes au sein de la fédération canadienne. Il serait grand temps que les autres provinces le reconnaissent et arrêtent de s'enfouir la tête dans le sable, comme si elles cherchaient à se convaincre que tout va bien dans le meilleur des mondes ! Ce n'est pas parce qu'elles ne voient pas de problèmes qu'ils n'existent pas. En ce sens, je serais partisan d'un fédéralisme asymétique (mais je reviendrai plus tard sur ce point de vue). Des fois, c'est à croire que les autres provinces préféreraient que le pays se disloque plutôt que de répondre favorablement aux revendications des fédéralistes québécois.